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Le PJD Marocain* à la croisée des chemins..

                                                       
رصيف الصحافة: لهذه الأساب رفض بنكيران مقترحات شباط







 





                                              Le malheureux Benkirane se fait brûler les ailes par sa propre lampe

Une lettre à Louis XIV..C'est une des lettres que j'ai lues et qui retenait, un tout petit peu, mon attention; je suis tombé dessus complètement par hasard il y a quelques semaines, sans savoir qui était l'auteur. C'est le début de sa lettre à Louis XIV, écrite pendant l'hiver de 1694/1695, pour lui passer un gros savon.Elle commence ainsi:

"La personne, Sire, qui prend la liberté de vous écrire cette lettre, n'a aucun intérêt en ce monde. Elle ne l'écrit ni par chagrin, ni par ambition, ni par envie de se mêler des grandes affaires. Elle vous donne le respect que mérite votre Majesté, sans être connue de vous;Avec toute votre puissance vous ne pouvez lui donner aucun bien qu'elle désire, et il n'y a aucun mal qu'elle ne souffrît de bon coeur pour vous faire connaître les vérités nécessaires à votre salut..."

Je pense que Louis XIV n'a pas lu cette lettre, car ce n'est pas lui, sûrement qui ouvrait sa boite à lettres. Dans son idée la lettre est destinée à donner des arguments qu'ils parviennent à faire comprendre au Roi à quel point le peuple souffre et meurt.

Bon, l'histoire c'est l'histoire mais les mots sont les mots. "Avec toute la puissance du roi il ne peut donner à cette lettre aucun bien qu'elle désire".. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais je trouve que c'est la plus belle alerte possible à adresser à Louis XIV, dans son ère mouvementée en quelque sorte, le moment de détresse d'un sujet de Sa Majesté à Sa Majesté le roi de France.En évoquant le cas de cette missive, qui n'est pas le nôtre d'ailleurs, je voulais seulement faire la comparaison entre la "confiance en soi" d'un sujet de Louis XIV et la bourrasque de notre Chabat.

L'exercie raté de la démocratie..La crise gouvernementale, ou plutôt la crise Chabat, entame son sort incertain dans l'absence de l'arbitrage royal tant attendu, et toujours pas de solution à l’horizon. Le parti de l’Istiqlal abat ses dernières cartes pour faire pression sur Benkirane afin qu’il accepte ses revendications déclarées et les autres, moins avouables. Et bien que le parti de Chabat ait imputé la suspension de sa décision de retrait du gouvernement au roi, il n’aura pas eu la patience d’attendre «l’arbitrage royal», et s’est empressé de proposer plusieurs autres solutions possibles.Une fois, Hamid Chabat dit que le salut est dans un gouvernement d’union nationale, et une autre fois il affirme que l’éviction du gouvernement de Benabdallah et de son parti serait un début de sortie de crise… et ainsi, la guerre se poursuit entre Istiqlal, le PJD, élargie subitement au PPS, employant toutes les armes, jusques-y compris les prohibées politiquement et moralement.

Pour sa part, Abdelilah Benkirane poursuit sa politique selon le principe que «le meilleur affront à infliger à ton ennemi est de ne pas lui répondre, comme s’il n’existait pas». Il a suggéré au porte-parole de ce dernier, Mustapha el Khalfi, d’aller dire aux journalistes que «le gouvernement bénéficie toujours de la confiance de Sa Majesté le Roi», bien qu’el Khalfi soit le porte-parole du gouvernement et non celui du roi ou du palais, mais tout le monde aura compris le sens du message… Le gouvernement ne peut se permettre de parler au nom du roi s’il n’avait préalablement reçu un feu vert pour le faire. Et cela signifie que Benkirane se trouve dans une bien meilleure position que son adversaire Chabat, jusqu’à aujourd’hui au moins, un Chabat qui semble perdre le contrôle de ses nerfs ces derniers temps… mais il demeure toujours entre les mains du syndicaliste un certain nombre de moyens de pression qu’il peut utiliser contre bien des personnes afin qu’elles l’aident à trouver une solution.

La seconde fois où l’exercice démocratique a été «avorté», c’est quand Benkirane a riposté à la manœuvre de Chabat en employant la même arme que lui, à savoir la recherche de l’onction royale, par cette mention sur la confiance de Sa Majesté le Roi, bien que ce ne soit pas le souverain qui vote les lois au parlement dans le cas où le gouvernement en arriverait à perdre sa majorité, pas plus que ce n’est lui qui prémunirait le même gouvernement contre une motion de censure qui pourrait le faire chuter …

En un mois, ou même moins, et depuis ce conflit de Chabat, le pays a perdu davantage dans le domaine économique et en matière d’investissements, les bailleurs de fonds observent et attendent en spéctateurs, les gens vident leurs comptes bancaires sous peine d'éventuelles pertes et la roue tourne au vide. Et puis, le budget de l’Etat a englouti encore des milliards de DH en raison de la non résolution du problème de la Compensation… et plus encore que cela, rien ne permet de croire que le ciel s’éclaircira sur les deux protagonistes, et le pays continuera de perdre encore et encore tant que toutes les parties en présence persisteront dans leur peur des urnes.

La popularité tant crainte du PJD ne sera pas érodée par l’opposition de Chabat, ou par l’entrave à l’action de Benkirane, ou encore par les manœuvres des rédacteurs en chef  de la télévision officielle… non, bien au contraire, tout cela ne fera que renforcer encore plus le PJD car ces comportements placeront la formation de Benkirane – à tort ou à raison – dans la position de la victime, du parti qui voulait sauver le pays de ses crises à répétition mais qu’on n’a pas laissé agir comme il le devait et le voulait, en le combattant en utilisant des moyens douteux qui émergent d'un vieux garage de cycliste, aux portes rouillées dans la ville de Fes.

Les seules choses qui pourraient permettre de vraiment juger de la popularité et de la force à venir du PJD, ou de sa faiblesse, sont son exercice réel et effectif du pouvoir et sa manière de gérer les dossiers difficiles et les politiques publiques, sa manière de prendre les décisions douloureuses et sa capacité, ou son incapacité, à trouver un remède aux nombreux problèmes économiques et sociaux d’un pays, parait-il, au bord de la faillite. Le pouvoir à mon sens, est une négociation permanente ; les techniques de sortie de crise et les décisions stratégiques ne peuvent se fonder uniquement sur les erreurs des adversaires, mais aussi et surtout sur une planification à long terme que Ssi Chabat n'en a pas sûrement…

Les dix commandements-PJD de Jbel El'tor¹.. Le PJD avait entamé sa présente expérience gouvernementale, il était venu armé d’une théorie politique aussi claire que cohérente sur laquelle il se fondait dans ses discours, ses prises de positions et ses comportements ; il présentait cette théorie comme étant une sorte de profession de foi, immuable, un choix définitif, et un fondement de sa pensée qui ne peut ni changer ni être remplacé par d’autres idées. Aussi, et nonobstant ce qui est enfoui dans les cœurs et les esprits, cette théorie s’appuie sur plusieurs préalables.

1/ La concertation entre le PJD et la monarchie est un principe aussi nécessaire que naturel ; elle est même à l’origine et au fondement de tout le reste. Ainsi, à partir de là, tous les conflits passés et les problèmes endurés étaient contraires à la nature des choses, une déviation par rapport au cours normal, fomentée et ourdie par les adversaires des deux parties. La formation islamiste et le palais devaient nécessairement converger vers les mêmes objectifs, devaient se comprendre et s’apprécier, et cela devait forcément se produire, tôt ou tard ;

2/ La mise en œuvre et l’application de la constitution de 2011 devaient passer par un obligatoire consensus avec le Roi ; les attributions du chef du gouvernement, prévues dans la Loi fondamentale, ne devaient ni ne pouvaient être effectives d’une manière automatique, mais devaient être tributaires d’une autorisation royale, ou au moins d’un signal des faucons de l'ombre. Les gens ne devaient pas s’attendre à voir le chef du gouvernement endosser son rôle constitutionnel unilatéralement car il fallait la convergence des deux volontés – Palais et chef du gouvernement – pour mettre en œuvre ce rôle. Cela nous rappelle le credo précédemment mis en avant du temps de l’alternance consensuelle, «nous réformerons dans une logique de consensus» ; cela signifie qu’il faut donner du temps au temps avant d’atteindre, à mon sens, ce consensus et de «mettre en œuvre la constitution» ;

3/ La présence au gouvernement représente la plus grande et la plus importante protection pour les islamistes. Elle est donc une nécessité stratégique; Benkirane avait déjà exprimé cette position voilà une dizaine d’années. L’homme estime ainsi que ce que pourraient subir les islamistes en dehors du gouvernement serait plus brutal et plus violent que ce qu’ils connaissent aujourd’hui qu’ils sont au cœur du pouvoir. Dans ce dernier cas, ils disposeront toujours d’armes pour riposter aux attaques, les anticiper et avorter les complots. Selon cette approche, le PJD, selon sa conviction purement partisane, n’est nullement un parti ordinaire qui agit dans des conditions ordinaires ; il est un parti visé, dont les membres sont également visés, un parti aux nombreux ennemis qui se protège et s’abrite derrière le bouclier gouvernemental ;

4/ Il ne faut pas s’inquiéter pour la popularité du PJD, ni se préoccuper de le voir perdre la première place. Cette formation restera la première au Maroc car elle ne peut perdre d’un seul coup 60 ou 70 sièges au parlement, permettant de la sorte au second de devenir premier et de la dépasser. Ainsi, les islamistes sont partis pour un bon mandat au gouvernement, au moins, et ils auront en conséquence le temps nécessaire pour imprimer leur marque à la gestion des affaires publiques au Maroc. Même s’ils perdent des voix parmi celles qu’ils avaient eues lors du vote précédent, ils garderont le demi-million d’électeurs loyaux ou semi-loyaux du fait des relations organisationnelles, humanitaires, associatives, idéologiques et aussi pour les activités de prédication ;

5/ Nos islamistes considèrent que leur passage de l’opposition au gouvernement, s’est produit à un moment et dans le cadre d’un contexte qui ne permettait nullement à leurs ennemis de se procurer les moyens adéquats pour contrecarrer cette tendance ; aujourd’hui, ces mêmes ennemis déploient tous leurs efforts pour empêcher que cela ne se reproduise de nouveau et pour récupérer ce qui a été fait dans ce domaine. Et c’est précisément la raison pour laquelle les islamistes font tout ce qu’ils peuvent, de leur côté, pour sécuriser leurs positions gouvernementales. Mais il serait à craindre que, dans cet objectif, ils puissent penser à avoir recours à des moyens non conventionnels car s’ils aspirent tant à accéder au pouvoir, c’est que dans leur esprit cette ambition a une finalité religieuse. Les amis de Benkirane ne dévient pas tellement de cette thèse, et rien n’indique qu’ils diffèrent de leurs pairs dans les autres pays en ce qui concerne cette manière de voir les choses ;

6/ Benkirane s’est engagé à défendre la stabilité du pays et à se dresser contre toute volonté ou velléité de porter atteinte à la monarchie Marocaine - c'est le coté le plus positif et le point fort de Mr.Benkirane -, à l’ordre public et à la bonne marche des institutions. L’homme se présente sous l’apparence de celui qui veut éviter au Maroc les bourrasques du «l'automne arabe» et qui veut lui éviter aussi de tomber dans une crise politique, face à un ancien cycliste enragé par la rouille et téténos des rayons-bicycle. Et c’est comme cela qu’il avait justifié le refus de son parti à adhérer officiellement au Mouvement du 20 février.

Une perte flagrante de temps..Quelle est donc la raison qui a fait entrer le gouvernement dans cette immense salle d’attente et qui lui a lié les mains – et les pieds –, l’empêchant de poursuivre les grandes réformes qu’il avait promises, concernant surtout : Caisse de Compensation, caisses de retraites, lois organiques, réforme de la fiscalité, lutte contre la corruption et organisation des élections communales..etc.. ?

L’une des caractéristiques de l'exécutif débutant est son capacité à consommer, voire perdre du temps et à marcher à l’allure d’un escargot vers les réformes, et cela complique la situation encore plus qu’elle ne l’est déjà. Le retard du train du gouvernement-PJD est en effet une question bien complexe, ce n’est absolument pas une agrégation de fautes personnelles consistant en une incapacité à accélérer le rythme.

7/ Il y a d’abord cette permanente «recherche du consensus» entre le palais et le gouvernement sur les grandes décisions et le fameux arbitrage du cas de Chabat. Or, dans le monde entier, le chemin le plus long pour décider et réformer est d’essayer d’obtenir un consensus. Si cette pratique pouvait être admise dans l’ancienne constitution, qui ne laissait qu’une très faible marge de manœuvre aux gouvernements pour prendre des décisions et lancer des initiatives, cela n’est plus le cas avec la nouvelle, qui a conféré de larges attributions et pouvoirs au gouvernement. L’actuelle Loi fondamentale a soigneusement dessiné les contours des pouvoirs du Roi et de ceux du gouvernement. Las… la logique des acteurs politiques, et surtout quand ils sont au gouvernement, est toujours fondée sur une culture du consensus, sur sa complexité, sur la recherche permanente de la confiance.

Et cela, nous ne pouvons le reprocher à personne d’autre qu’au chef du gouvernement qui a lui-même ouvert les portes à une négociation sur des pouvoirs gouvernementaux pourtant prévus et bien détaillés dans la constitution. En effet, quand ce texte qualifie le chef du gouvernement de partenaire dans la prise de décisions, et que Benkirane vient nous dire que « le roi est le véritable patron », cela signifie qu’il s’attache à la constitution non écrite au lieu de s’attacher aux nouvelles dispositions, bien rédigées noir sur blanc.

On a l’impression par moments que Benkirane tourne le dos au rôle et à la place que lui confère la constitution et que lui ont confié les urnes, hanté qu’il est par ce complexe de la confiance et habité par cette crainte de revenir à cet ancien malentendu qui a de tous temps éloigné les islamistes du palais. Mais, ce faisant, l’homme oublie qu’il a déjà apporté toutes les garanties de loyauté et de loyalisme à l’Etat, et la meilleure preuve de cela est son implication dans le processus d’évolution feutrée et pacifique et son refus de rejoindre les rangs de la rue ou à ceux qui les encadrent, ouvertement ou en coulisses, en plus du vote positif de son PJD au référendum constitutionnel et sa décision de se poser en obstacle à tout ce qui pourrait altérer la nature du pouvoir au Maroc. Pourrait-il exister d’autres garanties à apporter au pouvoir ?

8/ Il existe une vérité que tous les Marocains connaissent parfaitement et qui est que l’Etat est faible face à la puissance des lobbies qui ont cru, qui ont grandi dans un environnement politique et économique vicié et corrompu… Ces lobbies sont devenus en mesure de faire avorter tout projet qui ne servirait pas leurs intérêts et, pour ce faire, ils emploient des moyens divers et actionnent toutes sortes de leviers, même les plus douteux… Le problème aujourd’hui est que le gouvernement, malgré ses pouvoirs étendus et ses larges attributions, malgré son assise populaire et constitutionnelle, n’ose pas montrer les dents face à ces lobbies et groupes d’intérêts ; le gouvernement, en effet, persiste à vouloir convaincre les privilégiés, les rentiers et les bénéficiaires de tous ces avantages tentaculaires de renoncer « volontairement » à leurs intérêts indus et illégitimes. Prendre des décisions nécessite de l’audace et une certaine capacité à prendre des risques, à défaut desquelles rien ne pourra être entrepris ni réussi… Chaque jour, en Europe, de grandes décisions sont prises, malgré les guerres sourdes menées contre les différentes Exécutifs par les syndicats et les coups de boutoir des lobbies, mais les gouvernements et les ministres ne reculent pas pour autant…

9/ La lenteur, voire même le handicap qui frappe ce gouvernement émane du fait que ses deux principales composantes, Istiqlal et PJD, sont animées par des intérêts divergents. Rien n’unit ces deux formations, rien ne les rassemble, et surtout depuis que Chabat a été élu à la tête de l’Istiqlal, hormis leur présence au sein d’un même gouvernement. On peut même dire que l’Istiqlal « chabatien » est plus proche de l’opposition que du gouvernement, et donc, tant que Benkirane ne montre pas sa capacité à prendre des risques et à aller de l’avant, il restera otage des caprices et des humeurs de Hamid Chabat. Pendant ce temps, le temps passe, les réformes accusent de plus en plus de retard et c’est le pays, et la population, qui en paient le prix.

10/ L’administration marocaine, après des décennies d’immobilisme et de sous-développement, a pris la forme d’une armée en pleine déconfiture, incapable de bouger ; et si d’aventure, il lui arrive de remuer, c’est avec la plus grande lenteur et dans la plus grande difficulté. Cette administration est devenue « le plus grand parti d’opposition » à tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur… cette administration est aussi loin que l’on puisse être de la modernité et de la modernisation ; tous ses cadres et fonctionnaires sont en état de stagnation, sans formation, sans recyclage, sans qualification ou requalification, en plus d’une totale absence de contrôle et de surveillance. Comment donc les généraux-ministres peuvent-ils remporter des victoires avec une telle armée peuplée de ce type de soldats infirmes, incapables, incompétents, inconséquents, qui n’ont aucune raison ni avantage à bouger, surtout dans les administrations ayant trait avec le Marocain et son quotidien. Le résultat est donc ce que l’on voit, et non ce que l’on entend ; les résultats sont les faits et le parcours et non les effets des discours.

Mais le même Benkirane a parfois aussi menacé de descendre dans la rue, de même qu’il avait laissé entrevoir que les manifestations puissent reprendre de plus belle. Et cela pose la question de savoir si la théorie et les préalables que nous avons évoqués plus haut sont la conviction véritable, constante et permanente, dans tous les cas de figure qui se présenteraient, ou si à l’inverse, ils sont appelés à changer ou évoluer un jour prochain. La question est de savoir si le fait pour les islamistes de s’en tenir à leur théorie est conditionné, ou non, à la «compréhension» des autres et à leur sérieux ou si, dans le cas contraire, si ces autres font montre de comportements irresponsables, Benkirane pourrait se libérer de l’idéologie aujourd’hui exprimée ?

Il ne fait pas de doute que l’arrivée de Benkirane aux affaires a conféré à sa théorie une grande crédibilité aux yeux des siens. Mais, les évolutions auxquelles nous assistons actuellement, la montée en puissance des adversaires de Benkirane et l’apparition de grandes difficultés permettront-elles de continuer de penser à la solidité de cette fameuse théorie et au maintien de la confiance en elle ?

Or, il apparaît, par exemple, que Chabat est en train d’affronter Benkirane au cœur même de sa logique. Le leader de l’Istiqlal place le chef du gouvernement, ses idées et ses conceptions sur la phase en cours, au cœur de l’épreuve. En effet, Benkirane affirme que le consensus parfait avec la monarchie est une priorité qui passe avant la «nouvelle constitution» et avant l’application et l’exercice des attributions que ce texte confère au chef du gouvernement… Mais Chabat, pour sa part, répond dans la même logique, insistant sur le fait que l’avenir et le devenir de l’expérience gouvernementale en cours, et avant même que de revenir aux solutions constitutionnelles, devront être définis par décision royale.

Certaines analyses estiment que le recours du Conseil national du parti de l’Istiqlal à l’article 42 de la constitution est malsain d’un point de vue constitutionnel, surtout que l’arbitrage royal intervient entre les institutions et non pas entre les partis, et que la constitution de 1996 ne prévoyait pas d’articles qui évoquent « la démission individuelle ou collective des ministres » que l’on trouve dans l’article 47 de l’actuelle Loi fondamentale et qui consiste en le fait que les ministres peuvent présenter, le plus simplement du monde, leur démission à leur chef du gouvernement. Mais Chabat n’est pas tombé dans l’erreur ; il sait même très bien ce qu’il fait. En effet, il souhaite exprimer l’idée que la monarchie est à l’origine de tout, avant même la constitution, et qu’on ne peut se prévaloir de ce texte ou des urnes ; autrement dit, l’expérience actuelle doit reprendre sa juste proportion et rester dans ses limites, ne pas s’enrober d’une aura qu’elle ne possède pas. Conclusion : l’arbitrage royal ne doit pas être appréhendé ou compris selon les mots de la constitution qui dit que le souverain exerce ses prérogatives « dans le cadre des pouvoirs qui lui sont expressément dévolus par la constitution » ; cela va en effet plus loin et l’arbitrage royal revêt une dimension plus globale et absolument pas limitée par les dispositions de la Loi fondamentale.

Abdelilah Benkirane – qu’il ait bien ou mal fait dans sa manière de considérer les revendications de l’Istiqlal depuis le début – se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins ainsi que dans une situation bien peu enviable. Il est en effet tenu par principe à la théorie qui lui a permis d’arriver aux affaires, qui veut un retour à un «consensus» avec le Roi quant au devenir de cette expérience politique, en dépit du fait que ce consensus puisse passer par la réponse favorable à une partie au moins des doléances de Chabat. Cela affaiblira encore plus Benkirane et pourrait même influer sur la cohésion et la sérénité internes du PJD. Mais si, dans le cas contraire, le chef du gouvernement regimbe et insiste pour s’en retourner aux urnes aux fins de trouver une solution à la crise, alors il sera dans l’obligation de reconnaître que toute sa théorie était fausse, originellement incorrecte.

Jusqu’à aujourd’hui encore, Benkirane persiste à dire que cette théorie est la seule qui doive être suivie par son parti, qu’il n’en existe pas d’autre(s), et qu’il bénéficie d’un soutien et d’une délégation quasi-totale pour évoluer dans son cadre. Si cela est confirmé, si de nouvelles concessions sont acceptées, si l’expérience en cours continue d’être affaiblie, et bien elle le sera encore plus, en toute logique et au final, on pourrait se demander : que reste-t-il de cette expérience, nonobstant le projet sociétal qu’elle englobe ? Benkirane ne craindrait-il pas, finalement, de tout céder ? Et continuera-t-il de bénéficier d’autant de soutien de la part de son parti ?

L’initiative anticipée du PAM et du RNI, qui ont tous deux déclaré leur refus de se joindre au gouvernement car ils ne doivent pas être considérés et ne se considèrent pas comme une «roue de secours», signifie que la pression continue de s’exercer sur Benkirane de toutes parts et que la seule chose qui était demandée au chef du gouvernement et du PJD était de rendre un précieux service – faire cesser la contestation populaire – mais sans qu’il ait le droit ou la possibilité, après qu’il ait rempli son engagement, d’en recevoir la récompense politique, une récompense à la hauteur du service rendu.Bonne lecture.

                                                                                           Cordialement,Chihab25

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*-.Je dis bien Marocain, puisqu' il éxiste déjà le PJD  Turc

¹-.El-Tor, en arable : الطور‎, cité au saint-Coran au sud de Sénai en Egypte. Son nom provient de Djebel El-Tor, le mont où le prohète  Sidna Moussa aurait reçu les tables de la loi.

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