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  • II - La France et la frontière avec l'Algérie (1837/1902)

    La légitimité des frontières Marocaines :

     

    La «Dahra» qui veut dire les hauts plateaux, prolongeant le « tell Oranais » vers le sud jusqu’au bordures du Sahara, et à l’ouest la vallée de la Moulouya séparant le tout du reste du pays. Humainement, elle groupait des tribus d’origines diverses représentées essentiellement par les Arabes de Beni Maâqal et le Berbers Zénètes. L’importance stratégique de cette zone s’était affirmée depuis l’époque romaine. Les luttes incessantes entre les différentes dynasties maghrébines ne firent que la confirmer. Ce n’est qu’après l’occupation de l’Algérie par le Turcs que s’établit une démarcation assez nette entre les domaines marocain et algérien.

     

     En 1647 un accord était conclu entre le sultan Alaouite Moulay M’hammed et les turcs de la régence d’Alger fixant à la « Tafna » la limite entre les deux souverainetés. Cette même limite sera prise par les Français lors du traité portant le même nom entre le Maréchal  Bugeaud  du côté français et l’Emir Abdelkader du côté Algérien en 1837.

     

    Oujda, secondé par les Kasbah de Saidia et celle d’El-Aioune-Sidi-Mellouk (sidi Makhokh d'autrefois),devint le centre autour duquel s’articulaient les activités des populations restées attachées à l’autorité chérifienne. Aussi acquit-elle un rôle important économiquement, d’abord en tant que marché régional,puis en tant qu’étape de l’itinéraire suivie par les pèlerins et les commerçants vers la Mecque, et enfin comme débouché de commerce de Melilla.

     

    Administrativement la ville d'Oujda était dirigée par un caïd jusqu’en 1859, date à laquelle il fut remplacé par un  "Amel "Gouverneur. Celui-ci était entouré par un corps de fonctionnaires, dont l’Amine qui collecte les impôts,les amendes et les droits de douane et de marché, et le cadi qui rendait la justice pour toute la province. Dépendaient de l’autorité du Gouverneur, le caïds de toutes les tribus qui étaient,soit désignés par le sultan en cas de litige à propos du choix de leurs contribues, soit proposés par eux et confirmé par le souverain. La nomination se traduisait par l’octroi d’un cachet et d’un burnous (Sel Ham) à l’occasion des cérémonies de l’allégeance «  La Bay’ a », (la fête du trône selon le protocole de la chancellerie Marocaine actuelle) auxquelles participaient les notables des tribus et les personnalités influentes.

     

    Celles-ci, avaient en outre des Jmaa, formées des cheikhs des différentes fractions. Oujda avait aussi une Jmaa, regroupant les cheikhs des quartiers et qui se réunissait sous l’ordre du l"Amel"Gouverneur et parfois réglait toutes les affaires en cas d’absence ou de faiblesse de celui-ci.

     

    En 1894, on avait recensé vingt-deux caïdats relevant de l’autorité du "Amel" Gouverneur d’Oujda : quatre pour la tribus des Houera ; un pour les Krarma, regroupant les Krarma proprement dit et les Ahlaf ; un pour Beni Bou-zeggou s’étendant à une partie de Beni ya’ala, les Sfassif ; un pour les Beni ya’ala Gharaba un pour les Zekkara ; un pour les M’haia duquel dépendaient les Beni Mathar ; un pour Lasja’a d’El-Aioune-sidi-Mellouk ; un pour les Mzaouir ;un pour les Oulad Mansour ;neuf pour les Beni Znassen en plus du caïdat d’Oujda administré directement par l"Amel" Gouverneur lui-même et comprenant une partie de Beni Khaled ; les Beni Oukil ; les Angad Cheraga et le Beni Hamlil.

     

    Toutefois, il n’est pas facile de déterminer avec exactitude ni le nombre de caïdats, ni celui des tribus relavant de l’administration de la province. L’étendue même de la province n’était pas stable, d’autant plu que la mouvance des tribus rendait inéluctable les fonctionnements et fusions continus. Ce qui entraînait d’une part l’inconstance de l’autorité et la multiplication des objets de rivalités entre les caïds et le Gouverneur, et causait d’autre part des troubles incessants entre les tribus.  Aussi, les estimations des populations de la province ne peuvent-elles qu’approximatives.

     

    Les Angad :

     

    Les Angad seraient des Arabes de Beni Maaqal,installés dans les environs d’Oujda par le roi Zianite Abou Hammou II,vers 1360. Le traité de Lalla Maghnia en 1845 les sépara de leurs cousins les Angad d’Algérie, les oueld Riah et les Aachach répartis entre Sebdou ,Maghnia et El Aricha. Bien qu’occupant deux plaines, celle qui porte leur nom avait l’aspect de désert et celle de Trifa, les Angad renoncèrent à leur tradition de nomadisme.Enclavés entre les Beni Znassen au Nord et les M’haia au Sud, ils ne pouvaient pratiquer qu’un nomadisme restreint, poussant leurs troupeaux de camelin, de bovins, d’ovins et de caprins jusqu’au-delà de la frontière.

     

    Grâce à leur importance numérique, à leur position centrale dans la province d’Oujda et à leur tradition guerrière, les Angad allaient jouer un rôle important dans les rapports entre la France et le Maroc. Ils n’avaient pas cessé depuis 1830 d’êtres mêlés à toutes les questions soulevées par ce voisinage inhabituel. Leur participation à la bataille d’Isly, leur soutien à l’Emir Abdelkader et leur incursion en territoires algériens contre les tribus soumises à la France attirèrent sur eux des expéditions.

              

    Les Beni Znasen, conscients de leur force, entendaient s’imposer à toute la région. Dans ce but, ils participèrent aux cotés des troupes du Makhzen à la bataille d’Isly en 1844 (4 août), soutinrent eux aussi l’Emir Abdelkader, puis se retournèrent contre lui,obéissant à l’ordre du sultan, entre 1945 et 1847 . Les autorités algériennes hésitaient entre les châtiments et le rapprochement avec les chefs des tribus. Les efforts de ceux-ci, et plus particulièrement avec les Ouled El-Bachir aboutirent en 1847 à la nomination de l’un d’autre eux au de poste de Gouverneur d’Oujda,par le sultan Moulay El Hassan. Mais cet acte suscita l’hostilité des tribus voisines, et finit par ruiner le prestige des Beni Znasen.

     

       Les tribus des Chorfas et LM’rabtine :

     

    Celles-ci, présumées descendant du prophète Sidna Mohamed (sws),ou tout simplement détentrices d’un savoir-faire religieux et d’une réputation de dévotion, bénéficiaient d’un prestige,voire même d’un pouvoir qu’elles savaient entretenir. Elles intervenaient dans les conflits intertribaux, normalisaient et moralisaient leurs rapports.  Leur ascendance religieuse et souvent magique leur permettait de les mobiliser au « Jihad » contre les atteintes portées à l’Islam dans territoire chérifien. El représentaient pour cela une véritable force politique que le Makhzen ménageait de s’assurer leurs bons offices. Aussi ne subissaient-elles pas l’autorité des caïds.  Pat contre elles jouissaient du droit de collecter les ziara : aumônes rituelles, et les H’dia : cadeaux. Pour cette raison elles entretenaient de bons rapports avec les zaouïas nationales et particulièrement   :la Ouazzania,la Qadiria, et la Tijania. Mais comme toutes les autres tribus elles étaient divisées en fractions et s’adonnaient à des activités lucratives, notamment le commerce et la transaction de bétail, parmi les tribus, telles que : Les Beni Bou-Hamdoun ; et les Beni Hamlil.

     

    Les tribus tampons :

     

    Disposant d’une force numérique relativement moyenne, des tribus telles que les Beni Bou-Zeggou, les Beni ya'ala, les Beni Mathar, les Sja’â, les Zekkara,  étaient obligées de se composer avec les tribus les plus puissantes comme les Angad et les Beni Znassen. S’alliant tantôt à l’une, tantôt à l’autre, elles provoquaient maints conflits généralisés à toute la région.

     

    Une tribu de transition : les M’haïa :

     

    La tribu M’haïa un conglomérat de groupes d’origines diverses. Seul le petit noyau des M’haïa El-Oust (M’haïa centre) gardait le souvenir de la vague déferlante des Arabes " Beni Hilal ", qui dévastaient l’Afrique du Nord durant les 11° et 12° siècle du deuxième millénaire écoulé. Autour de cette fraction se rassemblèrent les Ouled Barka, qui appartenaient initialement aux Doui Meniai et Ouled Jrir. Une autre fraction des M’haïa ,les Achach, n’était pas hétérogène que les autres, Elle rassemblait en son sein les Ouled Sélim,originaires d’Outat El-haj de la haute Moulouya, les Chouaker venus de Sidi bel-Abbès, les Ouled Braz du Tafilalet ,et enfin les chorfa de Moulay Hachem.

     

     Peu enclins au travail de la terre les M’haïa disposaient d’un des plus grands troupeaux de la province. Leur aire de pastoralisation s’étendait entre la plaine d’Angad et la Dahra jusqu’aux alentours de Figuig. Dans ce long déplacement, ils se mettaient en contacts avec les principales tribus, telles que les Hmian, les Amour-Sahara, les Beni Guil, les Ouled Sid cheikh, les Doui Meniai et les ouled Jrir. Avec celles-ci, nous sommes déjà au Sahara Marocain Oriental,où le traité de Lalla Maghnia voulait qu’il n’y eu pas de limite territoriale pour que la France puisse tailler  à son guise la carte géographique de la région.

     

    Figuig et la Dahra :

     

    L'aglomération de Figuig, située à 375 Kilomètres au sud d’Oujda, Figuig représentait, d’après la convention de Lalla Maghnia, le ksar le plus méridional relevant de l’autorité chérifienne. Cette oasis constituait en réalité,un ensemble de huit ksours : El-Hammam el-Foukani ;El Hammam el-Tahtani ;El Maïz el-Foukani ;: El Maïz el-Tahtani ;Ouled Slimane ; El Oudaghir ; El Abidat ; et  Zenaga, dispersés autour de la Ghaba (forêt), de quelques 15O milles palmiers dattiers.  Elle occupait à 900 mètres d’altitude, une cuvette au pied de l’Atlas saharien, surplombé à l’Ouest pa Jbel Grouz et dominant à l’Est la vallée de l’oued Zousfana.

     

    Généralement, tous les Foaguig qui cultivaient intensivement les champs aménagés à l’ombre des palmiers,devaient la protection de leur oasis, aux grandes tribus guerrières qui sillonnaient la région : les Beni Guil ; les Ouled Sid Cheikh ; les Doui Meniai et les Ouled Jrir. Ils leur devaient aussi leur ravitaillement en céréales ; la production agricole principale de l’oasis était essentiellement vivrière.

     

     Du fait de sa position stratégique, Figuig acquit la renommée de clé du commerce saharien. En effet, elle était un carrefour où se rencontraient les caravanes du Tafilalet et celles des hauts plateaux, qui empruntaient ensuite la vallée ombragée de l’oued Zousfana, puis celle de l’oued Saoura, pour s’arrêter aux oasis de Ben Goummi, de Gourara, du Tidikelt et du Tout, ou pour continuer jusqu’à Tombouctou dans le Mali.

     

    Cette importance ne pouvait s’échapper aux voyageurs européens qui explorèrent la région. A leur tour les autorités Françaises d’Alger, et les responsables de la métropole à Paris ne tardèrent  pas à s’en apercevoir, et à regretter d’avoir reconnu la « marocanité » de Figuig par un traité international. Le principal motif invoqué à cet effet, se rapportait au caractère – présumé – symbolique de l’autorité Makhzenienne, qui laissait une autonomie relative à l’oasis. Effectivement, avant 1882, Figuig dépendait de la province d’Oujda et de ce fait la Jmaa assumait toutes les responsabilités. En outre l’oasis de Figuig ne tarda pas à devenir un centre de résistance,et un refuge pour tous ceux qui s’opposèrent à la présence Française dans le sud oranais qui va s'étendre aprés pour engloutir toute la Saoura et la région de Tindouf. Territoires reconnus jusque-là par la France terres inclues dans l'intérgité territoriale chérifienne.

     

    Les tribus de la Dahra :

     

     Autour de Figuig, s’organisait la vie des Amour, Hamian, Beni Guil, Ouled Sid Cheikh-Ghraba, Dou Meniai, et Ouled Jrir. Toutes ces tribus sillonnaient la Dahra,vaste terrasse d’Alfa (Lhalfa), qui leur servait d’aire de nomadisation commune. Si leurs migrations traditionnelles, au rythme des saisons, ne manquaient pas d’engendrer des conflits parfois sanglants, le traité de Lalla Maghnia eut pour conséquence un perturbation complète de leurs comportements. Du jour en lendemain, ils se trouvèrent dans une situation complètement paradoxe. L’application du dit traité voulait que ces tribus fussent partagées entre le Maroc et l’Algérie Française, alors que d’autres reçurent une nationalité différente de celle de leurs territoires, dans la perspective de procéder postérieurement par la France à la conquête de tout le  Maroc.

     

     Les A'âmour :

     

    D’importance modeste, la tribu des A'âmour était vraisemblablement la plus attachée à Figuig et ses environs. Elle appartenait, à l’origine à ces Hilaliens qui s’installèrent dès le 12°siècle du deuxième millénaire passé dans les ksours délaissés par les Berbers Zénétes qui eux, gagnèrent la région du tell, au Nord. Des trois fractions qui constituaient la tribu, celle de Souahla vivait dans les ksours de Tiout, de Sfissifa, d’Asla et de Ain-Sefra, situés au Nord et au Nord-Est de Figuig ; pour cette raison ils se dénommaient Cheraga. Celle des Ouled Slim occupait pour sa part les environs d’Ich et des deux Moghar, alors que la fraction des Oued Boubkeur compait dans la montagne de Beni Smir à l’Oueste de Figuig. Cette situation, devenue particulière depuis le fameux traité de Lalla Maghnia de 1845. C’est dire que les A'âmour étaient des Marocains d’origine et de fait, (mais soumis) à l’autorité française.

     

    Les Hmian :

     

    Tout comme les Ouled Sidi Cheikh divisés en Cheraga et en Ghraba, les Hmian furent partagés en Jenba Marocains et Chafa algériens. Ce partage qui découlait d’une ignorance totale de la réalité de la tribu, ne prit même pas compte du fait que la fissure allait s’opérer au sein d’une même fraction. Car les Hmian qui se présentaient comme suit : Hmian Cheraga, comptait trois grandes fractions : les Ouled Ziad – Les Rzaina – et les Trafi. Celles-ci réparties en cinq sous-fractions :Ouled Adelkrim – Derraga – Ouled Maallah – Ouled Serour, et les Akarma. Par contre les Hmian Gharaba, comptait deux grandes fractions : les Chafa du côté algérien regroupait les :Akarma – Ouled Mansourah – Bekakra et Ben Metharef. Par contre les Jenba du côté marocain comptait sept sous-fractions : Ouled Serour – Meghaoulia – Sendan – Ouled M’barek – Beni Okba et les Guiatra.

     

    La tribu Hmian formait avec ses deux parties une puissance tribale restait intacte sous l’administration française. Avant l’occupation de l’Algérie, les Hmian représentaient l’exemple même des grands nomades. Leurs pérégrinations les amenaient au Nord, jusqu’au Tell, où ils s’approvisionnaient en céréales ; après quoi, ils se dispersaient dans les steppes des hauts plateaux, pour ensuite descendre au Sud atteignant ainsi l’oued Namouss dans le grand Erg occidental. Et tous comme les grands pasteurs, ils s’adonnaient à un commerce de caravanes qui les guidait au Tafilalet, au Touat, et même au Beni M’Zab. A ceci, ils alliaient, une activité guerrière particulièrement vive, qui les avait poussé à se mettre au service, entièrement, des Alaouites.

     

    Cette attitude les amena aussi à servir d’auxiliaires aux troupes françaises, d’abord contre l’Algérien l’Emir Abdelkader,l'agitateur en 1847, puis contre les Ouled Sidi Cheikh en 1865 et en 1871, et enfin contre d’autres tribus marocaines telles que les Beni Znassen en 1859, et les Beni Guil en 1870.

     

             L’attitude des responsables français en Algérie, à l’égard des Jenba marocain était une constante méconnaissance du traité de 1845. Et si parfois – ils rappelaient leur appartenance au Maroc, c’était pour mettre au profit – l’équivoque de leur situation, au service d’une fructueuse politique d’indemnisations.

     

     Les Beni Guil :

     

    Voisins des Hmian et faisant partie de la puissante et redoutable confédération de Zegdou, les Beni Guil formaient la plus grande tribu de Dahra. Essentiellement pasteurs, ils avaient des origines diverses : Les Ouled Brahim,chorfa Oudaghir originaires de la région de Figuig ; les Ouled Farès, chorfa de la Saguiet-el-hamra ; les Ouled youb, originaires des Sja’â, alors que les Ouled Hajji et les Ouled Ahmed Ben Abdallah étaient d’origines inconnues.

     

     Cette excentricité venait de l’étendue de leur aire de pastoralisation qui avait pour limite, au Nord, à la région de Ras-el-Aîn, pays de Beni Mathar, au Sud les ksours de l’oued Zousfana, à l’Est, les parages du Chatt-el-Gharbi, et à l’Ouest les Ksours de Ain Ch’air, Bou Anane et Bou Kais aux bordures-Est du Tafilalet. Tout au long de leur parcours, ils se mettaient en rapport avec les tribus les plus diverses ; celles du Tell, comme les M’haia,celles des hauts plateaux et de la Dahra, celles du Sahara et du flanc Sud-Est du haut et moyen Atlas, à savoir : les Ait Atta – les Ait Moghad - les grandes tribus des Ait Seghr’Ouchen – les Ait Khabbach – les Ait Bou Ichaouen, les Ait Bou Meryem et enfin celles des oasis comme les A'âmour, et les Hmian.

     

    Exclusivement éleveurs de troupeaux, d’ovins, de caprins, et de camelins, les Beni Guil dépendaient entièrement des unes pour leur ravitaillement en céréales, et des autres pour les légumineuses et les dattes.

     

    La diversité de leurs origines, l’étendue de leurs parcours, et les multiplicités de leurs contacts se ressentaient profondément dans la vie quotidienne des Beni Guil. Ainsi maniaient-ils avec facilité les parlers Arabe et Berbère, d’une part.  D’autre part ils devaient soutenir des luttes incessantes contre les tribus voisines, et en même temps sauvegarder leur unité. Tâche, que seul un chef ayant une réputation incontestée de bravoure, ou un renommé de sagesse, pouvait réaliser. Mais ceci ne les empêchait pas d’entretenir des bons rapports avec le Makhzen à qui ils payaient régulièrement les impôts. En outre, ils offraient des Ziaras aux Zaouia de Kenadsa, de Kerzaz, et celle d’Ouezzane avec qui ils étaient en bons termes.

     

    Les responsables militaires du cercle de Mechria et ceux de la subdivision d’Aïn Sefra, conscients de l’importance de Beni Guil, en firent une cible de premier choix. La pénétration saharienne ne pouvait se faire qu’au prix de leur réduction.

     

    Les Doui Maniai 

     

    D’après l’une des traditions courantes sur l’origine des Doui Meniai, ceux-ci auraient quitté la côte atlantique, située entre l’oued Draa et la Seguiet-El hamra,touchée durement par la sécheresse. Ils se seraient installés dans la région de l’oued Guir, fertilisé par une inondation. Une autre légende qui est la plus probable, rapporte que les Doui Meniai auraient accompagnés les chorfas Alaouites, venus d’Orient, d’ « El Hijaz » de la prés-ile arabique au 13° siècle du deuxième millénaire écoulé, pour s’installer avec eux dans le Sijilmassa (le Tafilalet actuel). L’ancêtre des chorfas Alaouites -Moulay El Hassan Ben Mohamed Ben Kacem Eddakhil- aurait désigné «Abdelkarim Ben M'hamed el-Yamani, dit :  Mena’a » à la tête des troupes de cavaliers qui le protégeaient. De lui descendraient les Doui Meniai.

     

    Au-delà des légendes, il est bien confirmé par les historiens et par les archives de la bibliothèque royale de Rabat, que les Doui Meniai, furent parmi les premières tribus de Beni Maaqal à soutenir les Alaouites dans leur parcours de redressement du pays, et dans l’affermissement de leur hégémonie.  La tribu de Doui Meniai était le princpal pilier de soutien à Moulay Rachid, quand il se charga en 1666 de jetter les bases d'un régime monarque plus solide, et consolider à travers tout le pays la dynastie et le trône Alaouite,focalisant déjà l'attention dans le Tafilalet au Sud-Est du Maroc,. Cela fut en sauvergarde du pays qui se trouvait  hélas ravagé dans ses quatre coins par la propagation de l'anarchie, et du désordre à cause de la faiblesse de la dynastie "Sa'adiyyne". Pour cela, ils avaient pour mission de prévenir les attaques venues de l’Est, et de défendre les voies de communication de l’oued Zousfana qui allonge la région de Figuig,Hamada de Guir dans l’Est de Tafilalet, ainsi que les routes des caravanes qui amènent aux pays subsahariens du Sahel.

     

    L’organisation de la tribu de Doui Meniai était typique. La plupart des études éffectuées sur les archises de la bibliothèque royale, leur attribuaient une division en cinq grandes fractions « Khams Akhmas » ; cinq cinquième, représentés par les groupes suivants : Ouled Youssef – Ouled Jelloul – Idarssa – Oulad Bou anane -  et Ouled Belguiz. Une autre division, en dénombrait trois groupes seulement : Les Ouled Slimane, Ouled Bou ânane,  et Ouled Belguiz, eux-mêmes divisés respectivement en 13,8 et 6 fractions. La division quinaire, semble-t-il, ne s’opère qu’en cas de prise d’armes à laquelle participaient les Ouled Jerir, comme sixième Khoms. Pour que la « Harka »  se présentait, elle doit se former avec pas moins de 1700 cavaliers et 2900 fantassins. Nombre assemblé selon l'importance numérique de chaque fractio

     

    Ni grands pasteurs, ni oasiens définitivement sédentaires, les Doui Meniai se déplaçaient dans un espace relativement restreint, dont les deux pôles la vallée de l’oued Guir, dont le torrent prend le nom de Zousfana à partir du ksar d’Igli dans la Saoura, et de la région d’El Ghorfa dans le Tafilalet. Les Doui Meniai possédaient le 1/5° des arbres des oasis de cette dernière région, alors qu’ils étaient les principaux propriétaires, de ceux des ksours de la Zousfana, à savoir : Beni Goummi, Zaouia Elfoukania et Tahtania, Taghit, Berrbi, et Bakhti à 60 kilomètres au Sud-Est de la ville de Béchar. A ceci s’ajoutaient des cultures de la rive droite de l’oued Guir et une relative richesse de troupeaux de chameaux, de moutons et de caprins qu'ils gardaient en paturage au rythme des saisons, dans une vallée fertile située à l'aval d'oued Guir "Abadla" batisée par leur initiative au nom des Alaouites El Abdallawiyne. Une richesse faible en comparaison avec celle de Beni Guil.

     

     Malgré leur éloignement des demeures du sultan, les Doui Menia étaient dévoués au Makhzen. Ils payaient régulièrement et volontairement l’impôt et se rendaient même soit à Fès ou à Marrakech, comme toutes les tribus marocaines, tenaient avec fierté des engagements de renouveler annuellement leurs allégeances au sultan Alaouite au pouvoir.

     

     La tribu de Doui Menia, une de ces tribus transhumant dans le sud-est du royaume – là où il y a aujourd’hui le problème des frontières avec l’Algérie, venait pour renouveler son allégeance traditionnelle « la  Bay’à » au sultan et pour recevoir l’investiture de ses caïds. Ainsi en 1876, une délégation de cette tribu fit le voyage à Fès où le sultan Moulay El Hassan,nomma ,parmi les émissaires,quatre caïds :Taleb El Ghazi pour les Idarssa, Si Bou Smaha pour les Ouled Yousef, Salem Ben Rahmoune pour les Ouled Jelloul,et Kaddour Ben Tahar pour les Ouled Belguiz.

     

     Toutefois quand un caïd venait à disparaître, son fils héritait son cachet, au cas ou la Jemaa de sa fraction, l’acceptait comme chef. Celle-là l’assistait dans ses fonctions et veillait à l’application des sentences prononcées par les cadis de Figuig ou de Tafilalet en cas d’appel. Aux Tolbas et M'rabitine revenait la tache de régler les affaires religieuses courantes.

     

    Les Cheikhs des Zaouïas de Kerzaz et de Kenadsa principalement, intervenaient dans les conflits qui opposaient la tribu de Doui Meniai et les autres tribus voisines. Mais généralement ils entretenaient des bons rapports avec leurs voisins de la « Dahra » qui se situe entre « El Mengoub » au Sud et « Ain Beni Mathar » au Nord, et du « Sahara » entre le « Tafilalet » et le « Hamada de Guir » au Sud-Est, principalement les Beni Guil et les Ait Khabbach. Par contre avec les Ghnanma de la Saoura, les hostilités ne cessèrent pas depuis que les Doui Meniai razzièrent leur Ksar de Mezaourou aprés avoir assassiné Ba-Hassoun, le trésorier de Dar El Makhzen, et les obligèrent à se réfugier à Beni Abbés en 1862.

     

    Les ouled Jerir :

     

     Les origines des ouled jerir sont aussi nombreuses que différentes. Ainsi les « M’falha », noyau central de la tribu seraient des Hamian, installés à Figuig l’an 1079 (V° siècle de l’hégire) ,et inféodés aux Doui Menia pour se défendre des attaques de leurs contribules d’origine. Les autres fractions, seraient constituées de groupes venus d’horizons divers, tels que :Cha’anba – Touat –Oudaya –Dkhissa- et de M’haya : Les H’nichat seraient des cha’anba, les Ouled Mellouk des Touatiens, les Ouled Kouider des Oudaya, es Ouled Bouzian,des dkhissa, et Ouled Brahim des M’haya. Se déplaçaient dans un grand parcours de pastoralisation limité par le Moulouya duNord, l’oued Namous à l’Est, Kenadsa à l’Ouest et l’oued Béchar au Sud. Grands éleveurs de troupeaux de moutons et de chameaux, ils possédaient aussi des palmiers dattiers autour des ksour de la vallée d’oued Zousfana :Fendi – Oum el-haïrane –ksar el-A’azouj – Hassi el-Bergui – Hassi el-Mir et N’kheila. Et même dans la vallée de l’oued Saoura, aux environs de Béchar et de Ouakda. Mais les ressources agricoles,produites par eux, pa des khemmas, étaient insuffisantes, ce qui les obligeait à se ravitailler en céréales chez les Doui Meniai, à Oujda et au Tafilalet, et en dattes au Gourara principalement dans l’oued Saoura.

     

    Tribu modeste, les Ouled Jerir, étaient considérés par le Makhzen, comme faisant partie intégrante de la tribu de Doui Meniai. Aussi ne recevaient-ils pas le cachet de caïd. C’est ce qui se passa en 1876, lorsque Slimane Ould Lhoucine de la fraction d’El A'âssa’A'âssa, et Mohamed Ould Lamkaddem de la fraction M’falha, accompagnèrent la délégation de Doui Meniai à Fès. Ils  se contentèrent de recevoir des lettres de commandement sans le cachet de caïd.